« Fais un vœu et il sera exaucé »

Dans les contes, cela finit souvent mal : le héros a à peine formulé son vœu qu’il le regrette déjà, ou bien deux personnages sont concernés, se disputent et finissent par ne souhaiter que le pire à l’autre, ou encore, après avoir fait le vœu d’être suffisamment sage pour choisir un bon vœu, le personnage décide de n’en exprimer aucun ! Disons simplement que les contes nous enseignent qu’il n’est pas très sûr de confier la réalisation de ses souhaits à quelqu’un d’autre, qu’il s’agisse d’une fée, d’un génie ou de tout autre être.
Et pourtant, qu’est-ce qu’on aimerait voir nos vœux se réaliser… En fait, c’est tout à fait possible !

Faire un vœu, c’est désirer quelque chose du plus profond de notre être et, quelques temps plus tard, le voir se réaliser.
Souvenez-vous quand vous étiez enfant, vous aviez tellement envie de traverser l’univers à cheval, de piloter un avion, d’aller dans l’espace… et vous y arriviez : vous montiez sur deux bouts de bois et les paysages défilaient, un caillou vous emportait dans les cieux et vous naviguiez à travers les nuages, une forme, un objet ou un mouvement perçu vous projetait au-delà des étoiles. Il y avait parfois des difficultés, les choses ne tournaient pas forcément comme vous le vouliez, vous inventiez même des obstacles pour le plaisir de les surmonter mais vous n’étiez jamais dépourvus de désir, vous ne subissiez pas une réalité extérieure à vous-même, vous étiez le centre de votre monde et capable de tout.

Voilà ce qui se joue dans le Jeu de Peindre : retrouver le sens du jeu, le pouvoir de réaliser ses vœux. Il ne s’agit pas du jeu « pour de faux », on retrouve cette capacité « pour de vrai ».
Cela advient sans aucune magie : d’abord, on oublie les regards, celui des autres et le sien, ensuite on oublie le résultat et l’on se retrouve… face au vide ! Sans objectifs, sans idées, sans attentes, sans jugements, sans félicitations, sans dons… on est là, parmi les autres, on peint. Puis, comme par surprise, surgit à nouveau ce quelque chose de l’enfance : on trace et l’on se dit que c’est bien agréable de faire ça, sans savoir pourquoi, on a même très envie de le refaire, alors on continue. On ne s’arrête pas devant ce qu’on fait, on ne réfléchit pas, on peint et là… quelque chose s’est passé, sur la feuille un monde s’est créé ; voilà, c’est fini, on laisse les feuilles derrière soi et on quitte l’atelier.
Ce n’est pas sur les feuilles qu’il s’est passé quelque chose mais à l’intérieur de nous, comme si l’on avait réactivé nos vœux sans pour autant les identifier, réveillé ce pouvoir de l’enfance.

Qu’est-ce qu’on a stimulé exactement ? la spontanéité ? le sens du jeu ? le désir ? Difficile de l’exprimer avec des mots, cela se ressent et conduit à des tracés universels, qui sont les mêmes pour tous, peut-être avons nous finalement retrouvé notre humanité, tout simplement. En tout cas, cette capacité à désirer et réaliser revient. Arno Stern écrivait que pratiquer le Jeu de Peindre amenait à « ne plus vivre par délégation de pouvoir », retrouver son propre pouvoir, ses propres désirs, sa propre force.

L’Éclos vous souhaite d’exprimer des vœux, pleins, et de les réaliser… petit à petit le monde s’en trouvera différent.

 

Il décida bientôt d’abattre sa demeure et de bâtir enfin l’atelier de ses rêves.
Un matin, comme il veillait aux travaux sur le chantier, dans les décombres de sa chambre il découvrit son vieux turban, et dans ses plis crasseux l’or qu’il avait perdu. 

Conte de Nurudin le cordelier, Henri Gougaud